Pourquoi l'éducation positive ne fonctionne pas ?

éducation positive parentalité bienveillante

Mon fils était en 2ème ou 3ème maternelle lorsqu'une copine m'a prêté un bouquin dont le titre évocateur parle à beaucoup de mamans je pense : "J'ai tout essayé !", d'Isabelle Filliozat, première fois que j'entendais ce nom.

 

Jusqu'alors, j'éduquais mes enfants sans trop me poser de questions, j'utilisais les méthodes habituelles qui sont aujourd'hui, en France comme en Belgique, mis sur la sellette : les violences éducatives ordinaires. Je mettais mon fils au coin, le laissait assis sur une chaise "pour réfléchir", lui donnait une tape sur la main si il me tapait, une fessée si il faisait quelque chose de passablement dangereux pour lui-même ou son petit frère encore bébé à l'époque. A côté de ça, je prolongeais l'allaitement, me montrais très affectueuse et disponible. 

 

Je recopiais tout bonnement l'éducation que j'avais moi-même reçue, à ceci près que mon petit garçon était un enfant "calme et sage" (contrairement à moi-même enfant, était cataloguée de "colérique et capricieuse") du coup, il n'y avait pas beaucoup de tensions ni de violences éducatives ordinaires appliquées.

 

Mais quelle claque que ce bouquin ! Il a changé définitivement ma façon de percevoir l'enfant, il m'a éclairé sur ses comportements et ses besoins. J'ai adhéré immédiatement et me suis mise à appliquer les bons conseils d'Isabelle Filliozat, à prendre en considération les besoins et les capacités de mes enfants.

 

Je vivais alors dans un climat de violences conjugales et je gérais à peu près tout toute seule dans des conditions évidement peu favorables, mais cette première lecture a semé les graines d'une autre éducation possible, à laquelle bien sûr mon mari portait peu d'importance...

 

S'en est suivi un divorce, dans des conditions très difficiles, pour autant c'est avec joie que j'ai pu recréer un environnement serein, un nouveau départ en tant que famille monoparentale, mes deux jeunes enfants et moi. Bien sûr j'avais droit à quelques remarques de mon entourage sur ma façon de faire "mais, mets le au coin !", "si tu continues à dormir avec eux ils te boufferont !", "il est trop âgé pour que tu l'allaites" et j'en passe...

 

Donc bref, jusque là, l'éducation positive fonctionnait à merveille, j'évitais tout recours à des violences éducatives ordinaires, je me sentais épanouie et proche de mes enfants, je continuais mes lectures dans le domaine de l'éducation positive, la communication non violente, les neurosciences, etc.

 

Pourtant, en 2016, c'est bien moi qui ai appelé au secours une accompagnante en parentalité. Le constat était terrible : depuis des mois, je passais mon temps à crier sur eux, je les laissais à la garderie pour ne pas les voir, je me levais fatiguée et sans joie, chaque moment à passer avec eux était la pire des corvées, je pleurais pour un rien, je piquais des crises de nerfs allant jusqu'à jeter des objets aux murs, j'avais envie d'avoir un accident pour être hospitalisée loin d'eux et parfois même j'imaginais le soulagement si il leur arrivait quelque chose...

 

Peu à peu, et sans vraiment m'en rendre compte, j'avais glissé tout droit dans les profondeurs du burnout parental. Un matin ordinaire, c'est à dire un matin où j'étais à bout dès le réveil, j'ai soulevé mon cadet par le col en hurlant sur lui comme une hystérique possédée. Ce matin était en fait extraordinaire, car grâce à ce geste "de trop" j'ai soudainement pris conscience de mon état, cela devenait grave et dangereux, pour eux comme pour moi.

 

Alors que c'est-il passé ? Et bien une combinaison de facteurs défavorables : mon divorce sous tension, la perte de mon emploi, le décès de mon frère. Je cumulais des épreuves assez difficiles, et si je restais à l'écoute de mes enfants, je me suis mise à ne plus tolérer qu'eux ne soient pas à mon écoute. Ma croyance à l'époque de mon burnout pourrait se résumer ainsi "J'ai tout donné pour les éduquer positivement et ils sont insupportables, ils ne comprennent rien et font de ma vie un enfer". Donc tout a coup, non, l'éducation positive ne fonctionnait plus : je n'avais droit à aucun répit face à ce qui me semblait être de vrais petits tyrans. Il n'en était évidement absolument rien, mes fils étaient simplement des enfants avec des comportements d'enfants, qui peu à peu aussi se sont exacerbés à cause du stress et des tensions que mon propre comportement engendrait...

 

Ce que j'ai compris à travers ce burnout c'est qu'il n'y a aucune baguette qui fonctionne avec les enfants : ni la baguette de bois, ni la baguette magique de l'éducation positive. Tout simplement parce que l'éducation positive, contrairement à la baguette de bois, n'est pas et ne sera jamais un outil d'obéissance...

 

Si la baguette de bois peut avoir des résultats surprenants parce que l'enfant se soumet par peur de représailles, elle n'en est pas pour autant efficace étant donné la perte de confiance, les sentiments d’isolement, de désamour et d'humiliation vécus par les enfants.

 

Quant à la baguette magique de l'éducation positive elle n'existe tout simplement pas. C'est un leurre. Nos enfants ont des comportements et des besoins d'enfants, ils ne sont pas capables d'entendre et de répondre à nos besoins et comportements d'adultes, ce n'est pas à eux de le faire, mais à nous-mêmes, de prendre soin de nous autant que nous prenons soin d'eux.

 

Aussi, appliquer des conseils d'éducation positive sert plutôt de boussole pour s'orienter et mieux comprendre la relation qui nous unit à nos enfants, leurs capacités et nos propres aptitudes. En aucun cas à rendre nos enfants "sages et obéissants".

 

Et oui, c'est un chemin souvent critiqué et parfois compliqué car loin de ce que l'on a nous-mêmes vécus.

Et oui, dans certains cas, l'éducation positive est utilisé comme "baguette magique" alors des attentes surréalistes s'installent et la tension monte, pouvant mener au burn out. 

 

Choisir l'éducation positive, c'est choisir un repère, un chemin, vers plus de bienveillance, d'empathie, de complicité envers nos enfants. Choisir l'éducation positive, c'est aussi faire le choix de lâcher du lest par rapport aux attentes et remarques de l'entourage sur comment devrait se comporter nos enfants, et cela nécessite aussi un profond travail sur nous-mêmes.

 

Enfin, choisir l'éducation positive, c'est aussi se donner le droit à l'erreur car, à moins d'avoir été éduqué dans ces conditions, il est parfois long le chemin pour accueillir ses propres colères et peurs, détricoter nos propres croyances et attentes portées sur nos enfants. En choisissant l'éducation positive, nous choisissons aussi de nous mettre en apprentissage, et cela ne se fait qu'avec des essais et erreurs, comme nos enfants à travers leurs expériences et comportements font des essais-erreurs. 

 

L'éducation positive ne fonctionne pas comme outil d'obéissance, elle sème les graines d'une relation humaine construite sur la complicité, l'écoute, l'empathie, la bienveillance et le respect face aux conflits, difficultés et incompréhensions possibles. Il n'y a pas, comme dans l'éducation "classique", de résultats immédiats, qui sont, je le rappelle, délétères pour l'enfant et la relation.  Il y a, au contraire, les résultats progressifs des apprentissages célébrés ensemble, au rythme des possibilités et capacités de chacun.

 


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Commentaires: 3
  • #1

    Fanny (mardi, 26 mars 2019 20:33)

    Merci Carole ! Ça me renvoie à la différence entre poser "un cadre" quel qu'il soit, et la clarté du message qu'on veut donner. Et aussi à regarder et avouer sa propre vulnérabilité.. Dur dur
    .. Je me rends compte que je manquais de clarté dans mes propos et mon attitude vis à vis de mes enfants parce que je n'osais pas contredire leur papa (nous vivons ensemble) sous peine d'incohérence parentale.. Error !!! Je renvoyais un truc d'insécurité finalement.. J'en reviens ! Merci encore !

  • #2

    Nicolas Sègerie (mercredi, 27 mars 2019 10:40)

    Encore un coup sur les mecs pères ou non. Les familles monoparentales ça n'existe pas. Le Burnout concept salarial ou entreprise, pas familial.ce qui manque c'est un père car l'éducation se partage. Nul ne saurait proposer une éducation parfaite. Les pingouins alternent. Ils n'apportent ni la même chose ni aux mêmes moments. La voix criante de la mère surprend par son étrangeté les enfants. Celle du père apporte le calme le réconfort le soutien l'alternance dans l'éducation est une force pour des enfants qui vivent dans le monde d'après. Intégrant aussi les autres membres et la société en général. C'est cela l'éducation et là pas de Burnout si le partage est accepté. Les pères ont souvent en cas de divorce une vision différente de la mère, c'est un des facteurs les plus importants des cas de divorce. Alors que trouver une voie ''positive''est possible les logiques actuelle est désacraliser l'éducation maternelle. C'est une grave erreur. Ce n'est pas pour rien qu'on observe qu'en grandissant les enfants séparés n'écoutent plus leur mère ''mono pas rentable. Il faut aussi écouter la voix du père qui naturellement apporte l'éducation dite ici positive en ce sens qu'il exposera plus facilement les enfants à la réalité des risques et de la société pour le faire émerger de la grotte maternante. Et les préparer pour leur vie autonome.

  • #3

    Nicolas Sègerie (mercredi, 27 mars 2019 10:44)

    Lire : ''de sacraliser'' au lieu de ''désacraliser'' saleté de correcteur qui a transformé le sens.